În 10 octombrie 1927, Jacques Bainville publică în L’Action française un nou articol despre România, în urma unei vizite efectuate în ţara noastră. Este un articol cald, care emoţionează. Bainville vorbeşte despre români ca despre o rudă de departe pe care ai descoperit-o după foarte multă vreme şi, dată fiind această depărtate, emoţia este dublă. “Santinele” ale Europei la hotarul Asiei, românii sunt înconjuraţi de vecini duşmani sau cel mult nepăsători şi străini, adică de altă gintă. Soarta României este, de aceea, teribilă, spune el. Pericolul cel mare este reprezentat, pentru noi, de vecinătatea Sovietelor. De aceea, cele două idei care definesc destinul politic al românilor sunt ideea de naţionalitate şi ideea de ordine. România nu-şi poate permite luxul unei democraţii, pentru că România are nevoie de autoritate, spune acest reprezentant al spiritului de fineţe. Deşi turneul său nu putea fi lipsit de interes diplomatic, tonul lui Bainville este atât de firesc cald, încât şi noi, ca români, avem senzaţia că ne-am regăsit o rudă de departe. Ca santinelă la graniţa Asiei, România rezistă comunismului, spune academicianul francez. Dar pentru ca rezistenţa aceasta să dureze, e nevoie ca ea să aibă un sprijin consistent în extremul Occident. De unde întrebarea gravă: Franţa va rezista ea oare?
Redăm mai jos textul original:
Un voyage, un beau voyage, en Roumanie m'a fait délaisser, durant deux semaines, le devoir du commentaire quotidien. Puis-je jeter toutes chaudes sur le papier, en descendant du train, quelques impressions ?
A près de 3 000 kilomètres de Paris, il est un pays de latinité, séparé de nous par plusieurs barrières, entouré de voisins différents ou hostiles, qui vit avec nous en idée, et qui se demande sans cesse : « Que devient la France ? Que pense-t-elle ? Que fait-elle ? » Oui, nous savons bien, en gros, que le peuple roumain est un peuple parent et ami, dont les affinités naturelles et électives sont françaises. Ceux qui le savent le mieux ne le savent pas encore assez quand ils n'ont pas vu et senti sur place le miracle d'un pays qui, aux bouches du Danube, aux bords du Pont-Euxin, à travers les siècles et les vicissitudes des oppressions, a gardé la conscience et la vitalité d'être un rameau détaché du monde occidental. Maurice Barrès aurait dit un « bastion de l'Est », le plus avancé et le plus exposé des bastions. Pays longtemps foulé aux pieds, pays maintes fois sacrifié, pays
victime de plusieurs barbaries et encore menacé, mais qui, de son insécurité même, de sa réaction défensive contre le danger des invasions tire les règles de sa vie : la définition de la Roumanie tiendrait peut-être dans ces quelques mots. En tout cas, c'est de là que découlent les
principes essentiels de sa politique comme de sa spiritualité. Regardez la carte. La Roumanie a six voisins. Trois sont hostiles : la Russie, la Hongrie et la Bulgarie. Les trois autres, Yougoslavie, Tchéco-Slovaquie, Pologne, sont slaves, avec une nature, des sympathies, des tendances divergentes. C'est encore avec les Polonais que les Roumains auraient le plus decontact si, géographiquement, ce contact n'était si étroit, réduit à une si mince bordure, et si, d'autre part, prise entre la Russie et l'Allemagne, la Pologne n'avait tant à faire pour se défendre elle-même.
De cet état de vie, on peut dire, sans rien outrer, qu'il est terrible. Auprès de lui, le nôtre passera pour doux, et notre fragile sécurité de limitrophes des Allemands devient presque enviable. C'est ce qui détermine les deux idées par lesquelles est dominée la Roumanie d'aujourd'hui, et sans lesquelles eue courrait le risque de périr : l'idée de nationalité et l'idée d'ordre.
Alors on ne s'étonne pas des sympathies que trouvent chez les intellectuels roumains les doctrines de l'Action française. On ne s'étonne pas de l'emploi, je dirai même de 1'adoption, qu'ils en ont faite. Qu'y avait-il à la base et à l'origine de l'Action française ? Un nationalisme
défensif, le sens d'un danger prochain, point de départ pour une définition des conditions du salut public. Toute l'histoire de la Roumanie contemporaine traduit cette définition, depuis l'établissement de la monarchie héréditaire, il y a soixante ans, jusqu'à la modification, par raison d'intérêt national, de l'ordre d'hérédité, l'institution royale étant conçue comme une fonction fondée sur l'utilité générale et dont les droits équivalent à des devoirs.
La Roumanie a besoin d'autorité. Selon le juste thème que M. Mussolini développait un jour, elle n'a pas les moyens de se payer le luxe d'une démocratie. Les hostilités qui l'entourent lui font un besoin d'un gouvernement fort. D'autre part, le voisinage des Soviets crée chez elle une répulsion salutaire, et il est proverbial à Bucarest de dire que tout ce qui est mauvais, jusqu'au vent glacé des steppes, vient de Russie.
Seulement, pour résister à tant de pressions et de pestilences, les Roumains ont encore un besoin : celui de sentir une résistance solide à l'extrême Occident. Leur véritable inquiétude, faut-il la dire ? Elle perce à travers leurs propos et leurs questions. Contre le communisme,
la Roumanie tient. La France tiendra-t-elle ? C'est peut-être le souci majeur de ces Latins postés comme des sentinelles aux frontières de l'Asie.
L'Action française, 10 octobre 1927.